Louer sa résidence secondaire

  • Partner - Responsable de l'Ingénierie Patrimoniale - Rothschild Martin Maurel

Nombreuses sont les personnes à apprécier les charmes d’une résidence secondaire. Lieu de villégiature, maison de famille permettant des retrouvailles périodiques entre générations, les plaisirs qu’elles procurent sont nombreux… mais parfois coûteux. En effet, le coût d’entretien annuel (hors réparations ponctuelles) d’une résidence secondaire varie entre 1% et 5% de la valeur du bien. Aussi, l’idée d’une mise en location est-elle parfois envisagée afin d’amortir les frais incompressibles que le bien génère (entretien, impôts, etc.).

Se pose alors un certain nombre de questions quant à la forme qu’une telle démarche peut prendre et à ses conséquences, parfois méconnues.

Une déclaration en mairie, voire une autorisation au préalable

Quelle que soit la durée de location envisagée, la première démarche consiste pour le propriétaire à déclarer le bien en “meublé de tourisme” auprès de la mairie de la commune où est située la résidence secondaire (Cerfa n°14004). Le défaut de déclaration, peut donner lieu à une amende de 450 euros.

Cette démarche permettra de savoir si le Conseil municipal a décidé la mise en place d’un numéro d’enregistrement. Dans l’affirmative, ce numéro sera à publier dans chaque annonce de location du bien. Dans le cas contraire, une amende de 5 000 euros est encourue.

Si le bien est situé dans une zone où le marché locatif est tendu (villes de plus de 200 000 habitants ou certaines communes très touristiques), le changement d’usage du bien nécessite une demande d’autorisation par la mairie. Cette dernière peut exiger une compensation pour le changement d’usage et/ou limiter l’autorisation à un certain délai. Il est vivement recommandé de respecter cette procédure car les contrevenants s’exposent à des sanctions sévères : 50 000 euros par logement et une astreinte d’un montant maximal de 1.000 euros par jour et par mètre carré jusqu’à régularisation. Des poursuites pénales sont même possibles en cas de fausse déclaration, dissimulation des locaux soumis à déclaration. Les conséquences potentiellement considérables, d’une absence de couverture par son assurance ne sont pas non plus à négliger.

Au même titre que les autres biens immobiliers détenus, les propriétaires de résidences secondaires doivent depuis le 1er janvier 2023, satisfaire à la nouvelle obligation déclarative pour les biens immobiliers (le défaut de déclaration étant passible d’une amende fiscale de 150€ par local) à accomplir pour la première fois avant le 31 juillet 2023.

Le contrat de location

Les locations saisonnières ne sont pas soumises aux règles applicables aux baux d’habitation. Pas de congé à signifier au locataire ni de durée minimale de location à respecter.

Attention cependant au risque de requalification en bail d’habitation si le contrat ne correspond pas à une saison touristique locale, le locataire pouvant alors demander à bénéficier d’un maintien dans les lieux et d’un bail d’habitation classique.

Un dépôt de garantie (habituellement du tiers du loyer), bien que facultatif, est vivement conseillé. Quant au contenu de l’annonce, il n’est pas à sous-estimer car, en cas d’erreur ou d’omission flagrante, il pourrait donner lieu à des dommages et intérêts. N’oubliez pas non plus de contacter votre assureur, afin de vérifier si votre contrat d’habitation autorise la location sans surprime ainsi que l’adéquation de sa couverture à votre projet locatif.

Verba volant scripta manent

La loi impose, sous peine d’une amende de 1.500€, la remise préalable au locataire, d’un descriptif du logement, de sa situation et des conditions de sa location. S’en dispenser pourrait s’avérer dommageable tout autant que la non-formalisation de l’état des lieux à l’entrée et à la sortie du locataire, aucun recours ne pouvant alors être fait par le propriétaire en cas de dégradations.

La fiscalité applicable aux revenus

La location meublée est une activité commerciale et relève par voie de conséquence du régime des Bénéfices Industriels et Commerciaux (BIC) et non de celui des revenus fonciers. Elle est exonérée de TVA (sauf accompagnée de prestations para hôtelières sans option possible).

Avec des loyers annuels inférieurs à 77.700€, le loueur en meublé touristique est soumis au régime du « Micro BIC » (sauf option pour le régime réel) : les loyers seront alors soumis, après application d’un abattement de 50%, à l’impôt sur le revenu au barème progressif, ainsi qu’aux prélèvements sociaux (17,2%) et éventuellement à la CEHR (3% et 4%). L’abattement atteint 71% et le plafond de recettes 188.700€ pour les chambres d’hôtes et les logements classés en meublés de tourisme, au sens du Code du tourisme, par un organisme agréé (le nombre d’étoiles, de 1 à 5, indique au client le niveau de confort, d'équipements et de services). L’obtention d’une seule étoile est suffisante pour être classé et l’attestation est valable 5 ans.

À noter que la loi de finances pour 2024 pourrait revenir sur ce dispositif de faveur.

Les revenus seront à reporter sur la déclaration complémentaire des revenus (n°2042-C-PRO) en y reportant le numéro Siret obtenu après inscription sur le site de l’INPI.

Si le montant des loyers dépasse ces seuils, le régime du « réel » s’applique. Ils seront assujettis à l’impôt sur le revenu (ainsi qu’aux prélèvements sociaux), sans abattement, mais les charges et éventuels intérêts d’emprunt sont déductibles et des amortissements sont praticables (à condition de tenir une comptabilité et d’inscrire le bien à l’actif, ce qui n’est pas toujours opportun).

Cela étant, la déduction des charges sera à réaliser au prorata des durées de locations effectives du bien (ex 4/52ème pour une location de 4 semaines), sauf les dépenses liées à la location elle-même, qui sont intégralement déductibles (frais d’annonce, commissions d’agence).

Les sommes seront à indiquer dans la déclaration spécifique BIC (n°2031), puis à reporter sur la déclaration complémentaire des revenus (n°2042-C).

Dans la majorité des cas, la location saisonnière d’une résidence secondaire relèvera du régime des Loueurs en Meublés Non Professionnels (LMNP). En effet, le régime du loueur en meublé professionnel (LMP) nécessite pour y être assujettis de remplir deux conditions : percevoir pour plus de 23.000€ de loyers et que ceux-ci représentent plus de 50% des revenus d’activité du foyer fiscal.

Le loueur professionnel pourra imputer d’éventuels déficits locatifs sur son revenu global et ses plus-values de cession immobilières pourront (sous certaines conditions) être exonérées d’imposition dans le cadre du régime des plus-values professionnelles. Il sera en revanche redevable des charges sociales comme tout commerçant (certes déductibles de son revenu imposable).

La taxe sur les logements vacants n’est pas applicable

Les résidences secondaires sont exclues de ce dispositif. Sont en effet considérés comme « vacants », les logements non meublés, occupés moins de 90 jours consécutifs au cours de l’année.

La taxe d’habitation : des hausses à venir

Les loueurs en meublés touristiques risquent de subir une hausse de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires, envisagées par un nombre croissant de communes manquant de biens pour loger leurs résidents. En effet, à compter de 2024 elles pourront appliquer une majoration de cette taxe de 5% à 60%, le seuil de 50.000 habitants qui auparavant conditionnait son application ayant été supprimé par la Loi de finances pour 2023.

La taxe de séjour

Instaurée par les communes touristiques dans le but de financer le développement du tourisme, cette taxe est collectée par le loueur qui la reverse à la municipalité. Son montant, fixé par le conseil municipal, s’étage de 0,2€ à 4,2€ par personne et par nuitée (selon le classement ou pas du logement).

 Attention si le bien est détenu via une société civile translucide

Le Conseil d’Etat a une interprétation très restrictive de la notion de caractère habituel de l’activité locative, comme l’a illustré un de ses arrêts. Une SCI, soumise à l’impôt sur le revenu, propriétaire d’un logement, l’avait loué meublé sur de courtes périodes trois années de suite (15 jours la première et seconde année, et un mois la troisième). L’administration fiscale avait alors soumis la SCI à l’impôt sur les sociétés (IS), au motif que le bien avait été loué plusieurs années de suite (la durée de la location étant sans incidence), conférant ainsi à cette activité un « caractère habituel ». Le Conseil d’Etat a confirmé que l’activité était bien commerciale et donc passible de l’IS. Cet assujettissement à l’IS pourra entraîner notamment l’imposition des plus-values de cession selon les règles de l’impôt sur les sociétés (faisant perdre l’abattement pour durée de détention applicable aux plus-values immobilières privées) ainsi qu’une double imposition des revenus et des plus-values de cession en cas de redistribution de ces revenus et plus-values (d’abord à l’IS, puis à l’IR lors de la distribution des dividendes).

Les cas d’indivision ou de démembrement

Conséquence de l’attachement à ces biens, les maisons de famille sont parfois détenues en commun entre les descendants de l’acquéreur, une fois celui-ci disparu.

La mise en location d’un bien indivis, directement ou par une agence immobilière, nécessitera l’accord des deux tiers des indivisaires.

Les loyers seront, sauf convention, à répartir entre les indivisaires proportionnellement à leurs droits dans l’indivision.

Là aussi, on ne saurait trop recommander la rédaction d’un écrit (convention entre les indivisaires), pour détailler certaines modalités et se prémunir d’éventuelles futures querelles de familles en la matière.

En cas de démembrement du bien, l’usufruitier (souvent le conjoint survivant), peut valablement décider seul de la mise en location et en percevoir intégralement les fruits.

Comme on le voit, une fois décidée, la mise en location d’une résidence secondaire, s’avère relativement simple. Un certain nombre de précautions étant à prendre pour garantir la sérénité en la matière.

1 Les paroles s’envolent, les écrits restent

Article achevé de rédiger le 30 juin 2023.

 

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