Clause assurance vie

Comment bien rédiger les clauses bénéficiaires de ses contrats d'assurance-vie ?

  • Partner - Responsable de l'Ingénierie Patrimoniale - Rothschild Martin Maurel

Les potentiels offerts par la clause bénéficiaire du contrat d’assurance-vie, moyen essentiel de ce dispositif, sont encore de nos jours relativement méconnus.

C’est en effet par ce document que s’appliqueront les souhaits du souscripteur quant à l’affectation des capitaux décès issus du contrat, aussi est-il important de ne pas la négliger. 

Ce document peut s’apparenter en de nombreux points à un testament. En effet, il s’agit dans les deux cas d’une transmission du patrimoine à terme, lors du décès de l’auteur (l’assuré) et seul ce dernier peut rédiger cet acte. Autres points communs : ses dispositions peuvent être modifiées à tout moment et une grande liberté existe quant à sa rédaction, permettant de l’adapter précisément aux objectifs recherchés ou de l’assortir de modalités d’application particulières. S’il est souhaitable de revoir périodiquement le contenu de son testament, il en est de même de la clause bénéficiaire de ses contrats, afin de garantir leur bonne adaptation aux souhaits du transmettant et au contexte patrimonial du moment.

Là s’arrête cependant la comparaison. En effet, la clause bénéficiaire peut être acceptée à l’avance (sous conditions de forme), alors que le testament ne le peut pas. D’autre part, les capitaux décès issus d’un contrat d’assurance-vie ne font pas partie civilement de la succession de l’assuré (sauf primes manifestement exagérées) et la fiscalité qui leur est applicable diffère de celle d’une succession.

Similitudes et divergences, font de la clause bénéficiaire du contrat d’assurance-vie un outil puissant et presque indispensable pour une transmission intelligente du patrimoine, à la génération suivante et/ou, aux petits enfants, voire aux tiers.

 

Une fiscalité de la transmission spécifique et bien souvent favorable

Les lois de finances successives ayant modifié la fiscalité attachée aux capitaux décès, des régimes fiscaux différents peuvent être appliqués aux différents contrats souscrits par un même épargnant au cours de sa vie.

La date de souscription des contrats et de versement des primes ainsi que celle de l’assuré lors de leur paiement sont les critères qui détermineront la fiscalité applicable aux capitaux décès : certains (vieux) contrats seront totalement exonérés d’imposition, alors que d’autres (plus récents), seront imposés. Gardons à l’esprit que si le conjoint survivant est désigné bénéficiaire, il sera toujours exonéré d’imposition comme c’est le cas pour la part de la succession de son époux(se) lui revenant.

On voit donc bien le levier dont dispose le souscripteur de contrats d’assurance-vie : selon la composition de son patrimoine (valeurs des contrats par rapport à l’actif successoral), et de ses souhaits, il aura intérêt à rédiger des clauses bénéficiaires différentes. Il pourra désigner par exemple son conjoint survivant comme bénéficiaire des contrats assujettis aux droits de succession (ce dernier en étant exonéré), ses enfants/petits-enfants/neveux/nièces comme bénéficiaires des contrats exonérés d’imposition et ses enfants/petits-enfants comme bénéficiaires des contrats peu imposés.

Il pourra également être intéressant, dans la clause bénéficiaire, de multiplier les bénéficiaires et donc les abattements, la transmission étant ainsi réalisée sans fiscalité (heureux petits enfants…).

Enfin, il est parfaitement loisible au souscripteur, dans la clause, de prévoir un démembrement des capitaux décès. Le conjoint survivant sera le plus souvent désigné usufruitier (aucune taxation n’étant due sur ces sommes), les enfants, n’étant imposés que sur la valeur de la nue-propriété des capitaux décès leur revenant.

Néanmoins, il sera également possible de sauter une génération en désignant les enfants usufruitiers et les petits-enfants nus-propriétaires. Par ailleurs, un quasi-usufruit peut être prévu par la clause bénéficiaire, afin de renforcer les droits (civils) de l’usufruitier.

 

La clause bénéficiaire type : un manque de souplesse évident

La plupart des contrats proposent un modèle de clause type dont la rédaction est souvent « Mon conjoint, à défaut mes enfants vivants ou représentés, à défaut mes héritiers ». Si la formule a l’avantage de la simplicité, elle n’en comporte pas moins de nombreux inconvénients, de par son absence totale de souplesse.

Tout d’abord, l’intégralité du capital revient au conjoint survivant, or les montants en jeu peuvent être significatifs et le conjoint peut, lors du décès, ne pas avoir besoin des capitaux, la part lui revenant dans la succession lui étant suffisante.

Par ailleurs, cette clause ne permet pas au conjoint survivant de renoncer partiellement au profit des enfants. Dans cette optique, il est possible pour le souscripteur de rédiger une clause bénéficiaire « à options » ou « à tiroirs ».

Dans ce type de clause, le souscripteur prévoit la possibilité pour le bénéficiaire principal (son conjoint) d’opter pour l’une des répartitions qu’il aura prévues c’est-à-dire un certain pourcentage des capitaux, à choisir parmi plusieurs propositions, x% en usufruit et y% en pleine propriété etc.

Ce type de clauses permet donc au conjoint survivant d’adapter parfaitement la répartition des capitaux à la situation familiale et patrimoniale du moment.

Le démembrement des capitaux décès est également possible, le conjoint survivant étant fréquemment désigné usufruitier et les enfants nus-propriétaires.

 

Encadrer et sécuriser les situations particulières

Souscripteur divorcé ayant des enfants mineurs, enfant prodigue, relations familiales complexes avec les beaux-enfants, etc., justifient parfois d’aménager la clause bénéficiaire.

Il sera par exemple possible de prévoir dans la clause, la désignation d’un tiers administrateur, qui sera chargé de gérer les capitaux décès qui seront versés à un enfant mineur. Par cette désignation, la somme versée au mineur sera soustraite à l’administration légale des parents, qui ne pourront pas agir sur l’utilisation qui en sera faite.

Ce tiers aura les pouvoirs que le souscripteur du contrat lui aura conférés dans la clause bénéficiaire et ce jusqu’à la majorité de l’enfant.  

Une autre faculté est offerte par la clause bénéficiaire : celle de pouvoir contrôler l’utilisation des fonds après leur transmission, notamment afin d’éviter leur dilapidation. Il s’agit dans ce cas d’une clause d’inaliénabilité temporaire. Par exemple, les enfants/petits-enfants, ne pourront pas employer les capitaux reçus, ni vendre les biens acquis en remploi ou les biens qui y seraient subrogés avant un certain âge et uniquement avec le consentement du conjoint survivant (ou du tiers administrateur).

 

La nécessaire actualisation périodique des clauses bénéficiaires

Naissance de petits-enfants, divorce, prédécès de certains bénéficiaires désignés sans ayant droit, création d’une société civile, sont autant d’évènements qui impacteront l’applicabilité de la clause.

Aussi, est-il recommandé de revoir périodiquement son contenu afin de le faire correspondre au mieux à l’évolution de la situation familiale, patrimoniale et le cas échéant pouvoir l’adapter aux changements de fiscalité.

 

Une souplesse de rédaction importante qui n’empêche pas un certain formalisme

Il n’existe aucune contrainte légale concernant la rédaction formelle de la clause bénéficiaire, hormis sa nécessaire clarté afin de permettre son application. Ainsi, la clause peut-elle être manuscrite ou dactylographiée.

Il existe quatre modes de rédaction possible :

- Le bulletin de souscription proposé par la compagnie d’assurance : solution simple mais, comme nous l’avons vu, qui peut ne pas être adaptée aux souhaits du souscripteur.

- La clause jointe au bulletin : il s’agit d’une lettre, dactylographiée ou manuscrite, datée et signée de la main du souscripteur et qui sera transmise à la compagnie d’assurance. Cette option permet de personnaliser la clause à la situation spécifique du souscripteur mais elle ne présente pas d’unicité, ni d’approche globale (si plusieurs compagnies concernées), et entraîne une certaine lourdeur des modifications (répétition si plusieurs contrats ouverts auprès de différentes compagnies).

- La clause déposée chez un professionnel, le notaire notamment. C’est une solution simple en ce qu’elle permet d’utiliser une clause unique commune à tous les contrats (avec une centralisation des éventuelles modifications futures). La compagnie est alors informée par le souscripteur qu’il a déposé sa clause auprès de l’étude notariale. Le notaire aura de son côté, une vision globale de la transmission. La conservation et la mise en application effective de la clause seront garanties par son dépôt au fichier des dernières volontés (FDV). Enfin, une discrétion sur son existence et son contenu pourra ainsi être assurée.

- Le testament. Cette solution revêt un formalisme lourd, la rédaction étant obligatoirement manuscrite et porte le risque éventuel d’une confusion possible avec un legs. Aussi, une attention toute particulière doit-elle être donnée à sa rédaction.

Outil tout autant puissant que souple, la clause bénéficiaire est donc un instrument auquel il est souhaitable de porter une attention particulière, notamment si les montants en jeu sont significatifs.

Vos interlocuteurs habituels chez Rothschild Martin Maurel, sont à votre disposition pour vous informer à ce sujet.

 

Achevé de rédiger le 18/01/2024

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