Asset Management Europe: Monthly Macro Insights - Février 2023

Marc-Antoine Collard, Chef économiste, Directeur de la recherche, Asset Management, Europe

Une réouverture plus rapide que prévu de la Chine, conjuguée à l’atténuation de la crise énergétique en Europe, ont permis d’améliorer les perspectives de croissance mondiale. Parallèlement, les investisseurs restent convaincus de la fin prochaine de la campagne de resserrement monétaire dans un contexte de baisse de l’inflation mondiale, anticipant même une réduction des taux directeurs dès le second semestre 2023. Toutefois, l’incertitude entourant ce scénario idyllique reste élevée.

Les craintes de récession ont disparu...

Les statistiques de janvier portant sur la confiance des entreprises ont indiqué un début d’année positif pour le secteur des services chinois, soutenu par l’espoir que l’abandon de la politique « zéro Covid » se traduise par de nouvelles améliorations de l’activité économique. Toutefois, des interrogations subsistent quant à l’ampleur et la durabilité de cette reprise, l’économie chinoise reste également confrontée à plusieurs vents contraires.

En Europe, les prévisions sur le prix du gaz naturel ont été sensiblement revues à la baisse grâce des températures hivernales relativement douces et à des niveaux de stockage plus élevés que prévu, réduisant fortement le risque de rationnement forcé. Les perturbations des chaînes d’approvisionnement s'étant, en outre, atténuées, les entreprises sont devenues moins pessimistes. Ainsi, l’indice S&P Global de la confiance des entreprises en zone euro en janvier a franchi le seuil neutre de 50, une première depuis juin dernier, renforçant l'espoir d’une amélioration dans les mois à venir.

Cependant, alors que la réouverture de la Chine s'accélère et que les craintes de récession en Europe s’évaporent, la dynamique américaine s'essouffle plus fortement que prévu. L'inversion de la courbe des taux, la chute de l'indicateur économique avancé du Conference Board et la nette contraction de l’indice ISM manufacturier – à son plus bas niveau depuis la crise financière mondiale de 2008, excepté la chute éphémère durant la pandémie – sont autant de signes d'un risque important de récession. Pour l’heure, les investisseurs ont décidé de ne pas tenir compte de ces signaux et restent optimistes quant à l'atterrissage en douceur de l’économie.

... même si le débat sur l'inflation n'est toujours pas tranché

L'inflation mondiale semble avoir atteint un sommet au troisième trimestre 2022, ce qui ne semble pas le cas de l'inflation sous-jacente qui reste bien au-dessus des niveaux pré-pandémiques. Les acteurs financiers s'attendent à ce que la normalisation des prix des matières premières entraîne une forte baisse de l'inflation mondiale, tandis que l’amélioration de la situation sur les chaînes d'approvisionnement entraînera une baisse de l'inflation sous-jacente des biens.

En revanche, l’incertitude entourant l’évolution de l’inflation globale reste significative. Dans un premier temps, l’impact de la réouverture de la Chine sur les perspectives d’inflation est difficilement prévisible. Dans un second temps, le rééquilibrage du marché du travail nécessaire pour ramener la croissance des salaires à un rythme plus conforme à l'objectif des banques centrales est sujet à débats.

Du resserrement inconditionnel au resserrement conditionnel

Comme attendu, la BCE et la Banque d'Angleterre (BoE) ont relevé leurs taux d'intérêt de 50 points de base début février. La BoE a semblé indiquer que le cycle de resserrement pourrait toucher à sa fin, mais a néanmoins prévenu que si des pressions inflationnistes persistantes étaient constatées, un tour de vis supplémentaire serait nécessaire. Pour sa part, la BCE est restée hawkish, le Conseil des gouverneurs ayant l'intention de relever une nouvelle fois les taux de 50 points de base lors de la réunion de mars et de poursuivre ensuite le resserrement, tout en martelant qu'elle maintiendra le cap en relevant ses taux de manière significative, à un rythme régulier et en les gardant à des niveaux suffisamment restrictifs pour garantir un retour rapide à l'objectif d'inflation.

Aux États-Unis, la Fed a ralenti le rythme de ses hausses de taux à 25 points de base, les chiffres d'inflation plus faibles que prévu semblant avoir justifié ce ralentissement. L’Institution insiste néanmoins sur le fait que d’autres hausses de taux seront nécessaires afin de faire baisser l'inflation, alors que le marché du travail reste très tendu et demeure source d'inquiétude.

Dans l'ensemble, les récentes réunions des banques centrales suggèrent que les politiques monétaires vont devenir plus restrictives au cours des prochains mois, mais à un rythme nettement plus lent comparativement à celui de la campagne de resserrement de 2022. Pour autant, cela ne préfigure pas des baisses de taux à court terme, car la lutte contre l'inflation pourrait s’avérer beaucoup plus complexe que ce qui est envisagé par les investisseurs.

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Achevé de rédiger le 8 février 2023

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