Asset Management Europe: Monthly Macro Insights – Novembre 2022

Marc-Antoine Collard, Chef économiste, Directeur de la recherche, Asset Management, Europe

L'économie mondiale reste confrontée à de forts vents contraires. Les marchés gardent l'espoir que les banques centrales mettront bientôt un terme à leur cycle de resserrement et donneront un répit à l'activité économique, même si la persistance de l'inflation pourrait doucher cet optimisme.

La pandémie et la guerre en Ukraine font toujours des dégâts

Si l'impact de la pandémie s'est atténué dans la plupart des pays, il continue de perturber l'activité économique dans d’autres, notamment en Chine. Bien que le PIB chinois ait rebondi au T3 2022 grâce aux effets de réouverture, les indicateurs du mois de septembre ont dressé un tableau peu reluisant pour la fin du trimestre. Les perspectives pour les prochains mois restent incertaines avec une confiance des entreprises passée en territoire de contraction en octobre, aussi bien dans le secteur manufacturier (49,2) que dans celui des services (48,7).

Aux États-Unis, le PIB signe au T3 sa première expansion de l’année, avec une croissance de 0,6% en glissement trimestriel ou de 2,6% en rythme annualisé. Toutefois, cette croissance s’explique surtout par la réduction éphémère du déficit commercial, notamment grâce à la baisse drastique des importations, alors que la demande du secteur privé est restée anémique, fragilisée par la consommation des ménages et le secteur immobilier sur lesquels pèsent l’inflation et la hausse des taux d’intérêt.

En Zone euro, la croissance du PIB (0,2% en glissement trimestriel) a été meilleure que prévu au troisième trimestre, l'économie allemande (0,3%) ayant étonnamment bien résisté en dépit des perturbations sur les chaînes d'approvisionnement, de la hausse des prix et des taux d'intérêt et de la guerre en Ukraine. L'indice S&P Global de confiance des entreprises indique cependant que le secteur manufacturier est déjà entré en récession. De plus, l'inflation a battu un nouveau record à 10,7% en octobre et devrait rester près de ce niveau pendant un certain temps, rognant le pouvoir d'achat des ménages et maintenant la pression sur la BCE pour qu'elle continue à relever ses taux d'intérêt.

Les investisseurs dans l’attente d’un pivot     

La persistance des pressions inflationnistes a déclenché un resserrement des conditions monétaires inédit par sa rapidité, son ampleur et sa diffusion entre les pays, ce qui a conduit à une forte appréciation du dollar américain et durci encore davantage les conditions financières pour le reste du monde. Les incertitudes continuent d'assombrir les prévisions de croissance mondiale et les risques baissiers sur l’économie demeurent élevés, tandis que les arbitrages politiques pour faire face à la montée de l'inflation sont devenus extrêmement complexes.

Ainsi, le risque d'une mauvaise calibration des politiques monétaire, budgétaire ou financière a nettement augmenté. Alors que l'activité économique commence à ralentir dans de nombreuses régions du monde et que des fragilités financières apparaissent, les appels à un assouplissement des conditions monétaires se multiplieront inévitablement. Pour autant, il existe des risques significatifs de resserrement insuffisant ou excessif. Dans le premier cas, l'inflation s’enracinerait encore davantage, les banques centrales perdraient en crédibilité et les anticipations d'inflation se désancreraient. L'Histoire met, par ailleurs, fortement en garde contre un assouplissement hâtif de la politique monétaire, le coût lié à la lutte contre l’inflation grandissant de façon significative. Dans le second, un resserrement excessif pourrait inutilement précipiter l'économie mondiale dans une récession profonde, surtout si les marchés financiers peinent à encaisser un resserrement trop rapide. Toutefois, les coûts de ces erreurs de politique ne sont pas symétriques et une nouvelle erreur d'appréciation sur la vigueur de l'inflation pourrait s'avérer beaucoup plus préjudiciable pour la stabilité macroéconomique future.

Dans ce contexte, la Fed a procédé à un relèvement de taux de 75 pbs en novembre pour la quatrième réunion d’affilée. Un ralentissement du rythme de resserrement à un niveau plus habituel de 25 à 50 pbs par réunion est désormais probable. Toutefois, le président Powell a concédé qu’il sera certainement compliqué pour la Fed de réussir un atterrissage en douceur et que, par conséquent, la probabilité d’une récession s’avère élevée. Les investisseurs lui emboîteront-ils le pas ?

 

Achevé de rédiger le 3 novembre 2022

Retrouvez l'analyse complète dans la Monthly Macro Insights.

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